L’équipe de France féminine de Goalball a terminé 12e des championnats du monde IBSA, disputés du 4 au 16 décembre à Matosinhos. Au Portugal, les Bleues d’Anthony Puaud, 6es de leur poule qualificative et 12es du classement général, ont beaucoup appris de cette première participation à un championnat du Monde. Elles ont pu se frotter à l’élite mondiale et à des philosophies de jeu différentes. Une expérience intéressante à moins de deux ans des Jeux Paralympiques de Paris 2024. Charly Simo, le directeur sportif de la discipline pour la Fédération Française Handisport, fait le point.
La performance de l’équipe de France répond-elle à vos attentes ?
Charly Simo : Nous ne pouvons pas, avec le staff, être contents de ce bilan. Cela dépasse les seuls nombres de victoires et de défaites (1 victoire, 1 nuls, 6 défaites). Je me focalise davantage sur les attitudes, notamment sur le plan défensif. Sur le plan comptable, on a pris 64 buts pour seulement 34 marqués. On est donc à moins trente. C’est trop. On savait que ce serait compliqué mais pas à ce point-là.
Comment l’expliquez-vous ?
C. S : D’abord, force est de constater que nous étions dans une poule très relevée puisque le Canada, la Turquie et la Corée, trois équipes de notre groupe, sont dans le dernier carré. La finale opposera la Turquie à la Corée, ainsi qualifiées pour les Jeux de Paris 2024 et le match pour la 3e place, le Canada à Israël.
L’absence de Coralie Gonzalez, la centre de l’équipe, a été préjudiciable. La centre est la joueuse cadre de l’équipe, elle communique beaucoup et assure la sérénité. Ce poste permet de stabiliser l’équipe d’autant que le secteur défensif est très important. Contre des nations aguerries, la ténacité défensive est primordiale. Cela incite les adversaires à aller chercher loin et à commettre des fautes. Or chaque faute est synonyme de penalty.
On s’était préparé mentalement à certaines difficultés parce que lors du dernier Euro, nous avions perdu nos deux premiers matches sans Coralie Gonzalez. Il ne faut pas se cacher derrière cette absence mais tirer le constat et travailler pour remédier à cette difficulté de centre, afin de garder cet équilibre collectif.
« Former une équipe homogène »
En quoi cette première expérience mondiale peut vous permettre de grandir ?
C. S : Le staff, qui s’est appuyé sur des sportives expérimentées, a aussi décidé de donner du temps de jeu à Loïse Rondepierre et Jahmali Berquier, les deux plus jeunes du collectif. Elles ont 24 et 19 ans, peu d’années de pratique et d’expérience mais elles ont des qualités intéressantes. Elles représentent l’avenir. Jahmali a, certes pris des buts mais elle en a aussi marqué beaucoup. C’est un diamant brut à polir. Ce championnat du monde a permis à ces deux jeunes de se confronter au gratin mondial, de mesurer le niveau. C’était important pour nous de les mettre en situation sur cette épreuve. Ainsi, le discours du staff passera mieux quand elles devront travailler davantage. C’est une condition indispensable si elles veulent prendre du plaisir.
Par ce choix, on espère poser des jalons pour l’avenir parce qu’une équipe ambitieuse doit avoir un banc assez fourni, tant cette discipline est exigeante sur le plan athlétique. On se doit donc de former une équipe homogène.
Quels sont les motifs de satisfaction ?
C. S : La réaction dans l’adversité et l’implication, match après match, de l’équipe. Les filles n’ont jamais baissé les bras. Avec le staff, nous les sentions très déçues après chaque défaite mais elles repartaient déterminées lors du match suivant. Elles sont restées mobilisées. C’est aussi la marque des futures championnes : apprendre de ces défaites pour mieux savourer les victoires de demain. C’est vraiment un premier galop d’essai dans l’optique des Jeux. Il s’agissait de notre seule opportunité d’affronter les meilleures nations mondiales, venues de tous les Continents, avant 2024. On a croisé des pays de trois continents différents.
Avez-vous décelé des caractéristiques de jeu un peu différentes en fonction des continents ?
C. S : Oui. Les Sud-Américains privilégient le spectacle, le jeu offensif et la prise de risques. Les Brésiliennes en ont d’ailleurs peut-être pris un peu trop. A l’inverse, les pays asiatiques sont très disciplinés et rigoureux défensivement. On retrouve cela aussi chez les nations africaines. En Europe, il y a plus de réflexion tactique pour amener l’adversaire à prendre des risques et à commettre des fautes. On a aussi pu mesurer, lors de ce Championnat du monde, l’importance du mental. C’est l’une des forces des équipes asiatiques et nord-américaines. Les Canadiennes, par exemple, ont renversé le match contre les Turques, championnes du monde et paralympiques. On n’aurait pas pu apprendre tout ça lors de matches amicaux. Il fallait donc être là.
« Les joueuses sont les ambassadrices de la discipline »
Cela offre des pistes de travail pour la suite…
C. S : Oui. Nous allons pouvoir axer notre travail sur deux piliers importants : la préparation physique individualisée et la solidité défensive. Les filles doivent avoir une posture de sportives de haut niveau. Elles doivent à la fois développer le cardio, l’endurance et tout ce qui est force, vitesse et vivacité. Cela va permettre de former le bloc défensif. Les deux piliers sont étroitement liés. Si tu formes le bloc mais que tu n’es pas résistant, tu risques de trop subir lors des temps faibles (quand le rapport de force bascule).
Comment surfer sur cette première participation au championnat du Monde pour développer la discipline en France ?
C. S : Je ne le sais pas, parce que nous sommes toujours confrontés à un problème de médiatisation. Si ce Championnat du Monde avait eu lieu en France, on aurait pu valoriser pleinement ce rendez-vous. Néanmoins, je crois au bouche-à-oreille. Le staff va travailler sur un projet ambitieux pour à la fois étoffer l’équipe et densifier la préparation de celle-ci. L’idée est d’avoir un vivier de bon niveau assez conséquent pour représenter la France aux Jeux de 2024. Nous allons donc devoir beaucoup communiquer à la sortie de ce Championnat du Monde.
Nous devons trouver de nouveaux pratiquants. En discutant avec des entraîneurs étrangers, on s’est rendu compte qu’il est difficile pour de nombreux pays de trouver des joueuses et des joueurs. Y compris pour les meilleures nations. On fonctionne beaucoup via les réseaux sociaux. Ce sont davantage les sportifs intéressés qui viennent à nous que l’inverse… Nous allons innonder la toile en surfant sur la dynamique des grandes compétitions comme ce Mondial ou encore l’Euro 2023 pour trouver de nouvelles pépites. Les filles de l’équipe, en partageant leur expérience, sont aussi les ambassadrices de la discipline !
Rédaction : J. Soyer
Les matches de la France
France – Danemark : 6-9.
France : Canada :
France – Argentine : 5-5
France – Mexique : 17-7
France – Turquie : 1-11
France – Algérie : 1-11
France – Corée : 3-9
L’équipe de France
Audrey Belkhir ; Jahmali Berquier, Loïse Rondepierre (AV Hauy Lyon), Gwendoline Matos, Sandrine Mourey (ASC des Centres Bregilles).
Absente : Coralie Gonzalez (blessée).
Staff
Charly Simo (directeur sportif), Anthony Puaud (entraîneur national), Charlotte Vidalot (Entraîneur adjointe), Samuel Mendy (vidéo), Gaëtan Hubaud (Kinésithérapeute)
Résultats
Finale homme : Brésil – Chine : 6-5. Finale dames: Corée – Turquie : 4-10 Match pour la 3e place : Canada – Israël : 2-4. Podium féminin : 1. Turquie, 2. Corée, 3. Israël.