Contrat rempli pour les Bleus à Manchester

Avec 16 médailles (4 or, 6 argent et 6 bronze), l’équipe de France de natation handisport a terminé 12e du classement des nations aux championnats du monde 2023. A Manchester, les Français, dans le sillage d’Alex Portal, triple champion du monde, de Laurent Chardard, sacré sur 50 m papillon et d’Ugo Didier, six médailles en six courses, ont largement atteint les objectifs. Ils font mieux qu’au Portugal, il y a un an et ont décroché trois quotas pour les Jeux paralympiques de Paris (28 août – 8 septembre 2024).

Décidément, les nageurs français aiment les dernières journées de championnats du monde. Comme il y a un peu plus d’un an au Portugal, ils ont vécu, à Manchester, un final en apothéose. Lors de cette dernière soirée, les Français ont décroché cinq médailles, dont deux nouvelles en or. Le dernier stage de dix jours à Limoges, effectué avec l’ensemble des sportifs et leurs entraîneurs personnels, laissait espérer de belles performances tricolores en Angleterre, lors de ces championnats du monde de paranatation. Cela fut le cas. Nombre de Français ont battu leur record personnel durant ce rendez-vous planétaire.

Une semaine à l’anglaise au cours de laquelle, l’organisation a été à la hauteur de l’événement. Guillaume Domingo, manager de la performance de la discipline pour la Fédération Française Handisport, dresse le bilan.

Guillaume, quelle dernière soirée ?
Oui. On a vécu une fin de compétition en apothéose avec deux médailles d’or, deux médailles de bronze et l’argent du relais. C’était une après-midi de folie. J’avais cet espoir et ça a fait du bien à toute l’équipe de terminer sur cette note-là. Tout le monde se projette, avec une énergie très positive, sur le travail qu’il reste à faire pour être encore plus fort aux Jeux de Paris.

Ces championnats du monde étaient aussi le premier mode d’attribution de quotas aux nations pour les Jeux paralympiques de Paris (28 août – 8 septembre)…
Oui, tout sportif terminant premier ou deuxième emmenait un quota pour sa nation. Toutefois, aucun cumul n’est possible. En somme, Alex (Portal) ou Ugo (Didier) qui malgré leur nombre de première et deuxième places n’ont ouvert qu’un quota chacun. Tout comme Laurent (Chardard), qui conserve son titre de champion du monde sur le 50 m papillon, en établissant qui plus est, un nouveau record d’Europe. A l’issue de ces championnats du monde, la France a donc ouvert trois quotas pour Paris.

Des nageurs capables de se remobiliser

En ce sens, Manchester constituait donc la dernière vraie répétition générale avant les Jeux paralympiques de Paris ?
Il y aura encore des compétitions de préparation mais ce mondial était certainement la dernière épreuve présentant un niveau aussi relevé que celui attendu à Paris. Toutes les nations étaient en quête de quotas et donc fin prêtes. On a donc une vision réelle assez proche de ce que sera la natation dans un an.

De manière plus globale, quelles sont les satisfactions et les déceptions ou les enseignements à tirer pour le clan tricolore ?
Laurent Chardard a connu un début de compétition un peu difficile puisqu’il ne monte pas sur le podium du 100 m nage libre, une course qu’il avait à cœur de réussir, même si ce n’est pas sa spécialité. Mais il s’est bien remobilisé pour aller chercher le bronze sur le 50 libre et finir en apothéose avec ce record d’Europe et la médaille d’or sur 50 m papillon. Sans oublier, l’argent sur le relais moins d’un quart d’heure après. C’est vraiment très bien. De manière générale, j’ai aimé la capacité des nageurs à enchaîner et se remobiliser quand cela était nécessaire.

Les plus jeunes ont appris de ces championnats du monde. Ils ont pris conscience du niveau international. Ils vont devoir redoubler de travail pour être encore plus fort.

A un an des Jeux, quel regard portez-vous sur l’adversité et comment celle-ci a-t-elle évolué ?
On constate que dans certaines classes, le niveau se densifie. Je pense notamment à la classe 6 de Laurent Chardard ou encore à la classe S9 où Ugo Didier a décroché quatre médailles d’argent et une de bronze à la touche sur le 50 m nage libre. La densité est encore plus forte. En ce qui concerne la classe d’Alex Portal (S13), l’incertitude quant à la participation de la Russie et de la Biélorussie peut rebattre un peu les cartes, d’autant que les Ukrainiens figurent aussi parmi les principaux concurrents aux premières places. Il y a des enjeux qui nous dépassent mais qui peuvent avoir une incidence sur le visage des podiums à Paris. Mais Alex a été magistral sur ces championnats du monde et devrait être encore plus fort à Paris. Les féminines auront un coup à jouer à Paris 

Chez les féminines, la France peut-elle espérer conquérir davantage de médailles ?
En S10, où nous avons les nageuses les plus expérimentées, le paysage international est assez stable. Il y a réellement des choses à jouer même s’il reste du travail à accomplir. Mais la médaille de bronze d’Émeline Pierre sur 50 mètres nage libre est très positive. A l’image de son beau 100 m nage libre, elle effectue de beaux progrès.

Anaëlle Roulet, elle, a également confirmé sa médaille mondiale de l’an dernier pour arracher le bronze à la touche sur 100 m dos. Elles sont dans les carcans pour viser un podium et avoir de très bons résultats.

Agathe (Pauli, S9), Léane (Morceau, S12) et Solène (Sache, S5) ont profité de cette compétition, leur deuxième épreuve internationale majeure, pour apprendre et comprendre ce qu’il faut encore effectuer pour se hisser en finale et se rapprocher des podiums.

Un mot aussi sur le retour d’Élodie Lorandi (septuple médaillée paralympique) ?
Élodie a effectué un travail très important pour revenir et se qualifier aux championnats du monde. Cela a payé parce qu’elle a réalisé de belles performances sur ces championnats. Elle a bien conscience du travail qu’il lui reste à fournir, mais elle a très très envie d’être performante.

Ugo Didier, qui comme il y a un an aux Mondiaux de Funchal a cumulé quatre médailles d’argent (+ une de bronze sur 50 m nage libre et une argent sur le relais 4×100), évoquait une certaine frustration…
Ugo nourrit une certaine frustration de toucher toujours l’argent, derrière Simone Barlaam, notamment. Néanmoins, sur le 100 dos, la bataille pour l’or a été plus qu’acharnée, puisqu’elle s’est jouée à sept centièmes. Cela lui a redonné confiance. Il sait que Paris, où il faudra être le plus performant, n’est que dans un an et qu’il va encore devoir travailler pour parvenir à dominer sa classe.

 Être téméraire et endurant dans le travail 

La dynamique collective est l’une des forces de cette délégation
Ce sont des choses importantes sur lesquelles il faut travailler. Les athlètes doivent encore plus réussir à se nourrir des performances des uns des autres. On doit accentuer encore cette dynamique de performance collective. C’est un point qui aidera l’équipe de France à être encore plus forte.

Quels sont les axes de travail désormais pour permettre aux Bleus de rester à ce niveau, voire de gagner encore quelques places dans la hiérarchie mondiale à Paris ?
Il va falloir être téméraire et avoir à chaque entraînement, à chaque mouvement et à chaque coup de bras, l’intention d’être meilleur que l’adversaire. Il faudra tenir cet état d’esprit sur la durée. Les Jeux sont dans un an et vingt jours. L’année va être très longue. Il faudra être costaud mentalement et dans les bras afin de s’entraîner encore plus fort.

Les 16 médailles françaises.
Alex Portal (S13) : 3 or (100 m nage libre, 400 m nage libre, 200 m 4 nages), 1 argent (100 m papillon)
Laurent Chardard (S6) : 1 or (50 m papillon), 1 bronze (50 m nage libre)
Ugo Didier (S9) : 4 argent (200 m 4 nages, 100 m nage libre, 400 m nage libre, 100 m dos), 1 bronze (50 m nage libre) : 1 bronze (50 m nage libre)
Anaëlle Roulet (S10) : 1 bonze (100 m dos)
Émeline Pierre (S10) : 1 bronze (50 m nage libre)
Hector Denayer (SB9) : 1 bronze (100 m brasse)
Kylian Portal (S12-13) : 1 bronze (400 m nage libre)
Relais 4 x 100 m nage libre 34 pts (Agathe Pauli, Émeline Pierre, Laurent Chardard, Ugo Didier) : 1 argent

Le staff des Bleus. 
Guillaume Domingo (chef d’équipe) ; Julien Moulin, Koen Van Landeghem (entraîneurs nationaux) ; Samuel Chaillou, Guillaume Benoist (entraîneurs) ; Baptiste Hemeryck, Thomas Fogel (kinésithérapeutes) ; Florence Garnier (analyste vidéo).   

Photos du mondial © Ralf Kuckuck